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Il y a des manières plus ou moins heureuses de gérer  son image. Communiquant pour la première fois depuis son arrestation, le cinéaste Roman Polanski a choisi le site internet « La Règle du Jeu », celui-là même qui a abrité les chroniques haineuses de Yann Moix à l’égard de la Suisse.

J’ai décidé de rompre le silence pour m’adresser directement  à vous sans intermédiaires et avec mes propres mots. Comme chacun d’entre nous j’ai eu, dans ma vie, ma part de drames et de joies et je ne vais pas essayer de vous demander de vous apitoyer sur mon sort, je demande seulement d’être traité comme tout le monde.

Roman Polanski, Extrait de sa lettre publié par la Règle du Jeu

Il ne peut plus se taire, Roman Polanski. Et il explique pourquoi sur le site administré par le philosophe français Bernard Henri-Lévy. C’est la première fois que le cinéaste tient des propos publics depuis son arrestation. Dans le court texte publié par « la Règle du Jeu », il explique qu’il avait demandé à ses avocats de limiter la communication au strict minimum : « Je voulais que les Autorités Judiciaires de Suisse des États-Unis ainsi que mes avocats puissent faire leur travail sans polémique de ma part ». Toutefois, voyant ses demandes refusées les unes après les autres il se décide à prendre la plume. Le texte qu’il donne à lire énumère les raisons qui le poussent à clamer son profond sentiment d’injustice.

Les arguments, on les connait. De nombreux blogs, articles et forums ont débattu du cas Polanski sous toutes les coutures. Les idées qui animent son « Je ne peux plus me taire » sont connues du grand public. La seule nouveauté réside dans le fait qu’elles sont le fruit ici du principal intéressé. Notons quand-même au passage son laïus sur sa situation financière. Il figure en bas de page, c’est le dernier élément que développe Polanski : « Je ne peux plus me taire parce que je suis assigné à résidence à Gstaad au prix du versement d’une très grosse caution que je n’ai pu recueillir qu’en hypothéquant l’appartement que j’habitais depuis plus de 30 ans ». Je ne suis pas sûr que ce genre de propos lui attirent une énorme sympathie. On a tous nos petits problèmes de trésorerie. Chalet à Gstaad ou non.

Ce n’est toutefois pas dans le contenu que réside le véritable intérêt de cette prise de position. Il paraît surtout pertinent de noter que Roman Polanski a choisi le site de la Règle du Jeu dont la direction éditoriale revient au « French philosophe » Bernard Henri-Lévy. C’est également ce site qui a abrité les deux chroniques haineuses de Yann Moix sur la Suisse, chroniques retirées du site après quelques jours (Non pas parce que l’auteur avait pris peur mais parce qu’elles constituaient en fait le teasing du nouvel ouvrage de Yann Moix). Vous en trouverez de larges extraits ici. Pour rappel, Moix,  s’en était pris directement aux citoyens suisses les traitant notamment de « mous salauds »  et soupçonnant l’existence d’un antisémitisme génétique au sein de la population helvétique. (A ce sujet, vous pouvez relire une interview de Moix réalisée par Le Matin). Si le but de Roman Polanski est d’attirer l’attention sur lui et de susciter de l’empathie quant à sa situation, il me semble qu’il a choisi l’un des pires médias pour le faire. Pour filer la métaphore locale, c’est un peu comme si Me Dolivo lisait une chronique de Marie-Hélène Miauton jusqu’au bout tout en approuvant les propos qui y sont tenus. Utopique. Bref: s’il s’agit de mobiliser l’opinion publique, du côté suisse c’est assez mal barré !

Il faut également noter que le fil de conversations, ouvert directement sous sa prise de position, ne lui est pas vraiment favorable. La plupart des commentaires lui suggèrent de faire profil bas et d’accepter de se rendre aux Etats-Unis afin d’y être jugé. Afin de donner une dimension symbolique forte à cette prise de position, il aurait peut-être fallu fermer l’accès aux commentaires ? Au final, difficile de penser que  cette opération de communication puisse vraiment profiter au principal intéressé. Dommage, car il en aurait pourtant bien besoin…

Guillaume Henchoz

Petite piqûre de rappel pour se remettre dans le contexte : relisez le billet « Pas de pot, Polanski »

Une réflexion sur “Il ne peut plus se taire, Polanski

  1. Pour ma part je suis d’accord avec BHL.
    Bien sûr personne ne peut cautionner ce que Polanski a fait en 1977!
    Sa victime réclame qu’on classe l’affaire. Sincèrement je réprouve cet acharnement de la justice américaine contre lui. Polanski n’est pas un criminel, il ne fait courir aucun risque à la société, au contraire. Il a une femme et deux enfants qui doivent terriblement souffrir de voir comment on traite son mari et leur père!

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